Histoire de la Maison Fraternelle
Rive Gauche/Rive Droite, antagonistes au XIX° siècle : dans les nouveaux quartiers de la Rive Droite se concentre une bonne partie de la bourgeoisie protestante (banquiers, industriels, professeurs d'université). La sociologie protestante de la rive gauche est beaucoup plus populaire, ce sont dans ces quartiers et principalement dans le faubourg Saint-Marcel (où nous sommes) que se concentrait une population très pauvre.
Sous Bonaparte la rive droite a deux temples : celui de Sainte-Marie et celui de la rue Saint-Thomas du Louvre, en échange duquel sera cédé en 1811 l'Oratoire du Louvre. On donne à la rive gauche le seul temple de Pentemont (ancienne abbaye de Pentemont) ; ce temple restera longtemps encore magasin de fourrages de la caserne voisine. Pentemont ne fut ouvert au culte qu'après 1840.
En octobre 1834 se fonde la pension Keller, rue de Chevreuse, et c'est vers la rue Madame que va se transporter peu à peu le centre protestant de la rive gauche.
Pourtant au XVIème siècle ce quartier fut le premier foyer de la Réforme. « Les progrès de la Réforme excitèrent bientôt une vive opposition de la part de ce corps (La Sorbonne) dont l'influence se fit facilement sentir sur la basse classe, alors comme toujours ignorante et tumultueuse. C'est cette alliance tacite mais naturelle, entre l'intelligence et la violence aveugle, que se servit l'esprit des ténèbres pour anéantir la lumière de l'Evangile. »
De nombreuses assemblées se tenaient ici dans le quartier Saint-Marcel. Le 4 septembre 1558, trois à quatre cents luthériens furent pris à partie à la sortie de leur culte qui avait lieu rue Saint-Jacques.
Un événement important s'est produit en 1563 : la destruction du temple des patriarches. Ce temple, certainement en bois, était situé sur la maison dite des patriarches qui avait été bâtie par Bernard Chanac, patriarche de Jérusalem.
Le 27 décembre, 2 000 protestants étaient réunis dans ce temple pour y entendre la prédication. Le curé de Saint-Médard, dont l'église était presque contiguë au temple, fit sonner à toute volée les cloches de son église pour empêcher la prédication. Le pasteur envoie alors deux diacres pour prier amicalement le curé de bien vouloir faire cesser cette sonnerie, mais les deux envoyés sont reçus à coup de pierres et l'un d'eux est tué. Les protestants avertis accourent à Saint-Médard où bientôt une lutte s'engage, mais la force armé intervient et les protestants ont gain de cause. Le soir après le culte, ceux-ci entrent triomphalement en ville ; mais cet imprudent étalage de leur succès excite la haine de leurs ennemis qui le lendemain se portent en foule vers leur temple et y mettent le feu. (lire la recension du même événement côté catholique).
Revenons maintenant au XIX° siècle
La population du quartier y est tout à fait misérable, composée de beaucoup d'immigrés venus de l'Allemagne et de la France de l'Est.
Première œuvre protestante dans le quartier celle de Léon Pilatte en 1848, né catholique dans le Loir et Cher, élève de l'école des Arts et Métiers d'Angers. A la nouvelle de la Révolution il accourt à Paris et loue la salle du Vieux Chêne au 69 de la rue Mouffetard. L'influence de Pilatte sur les ouvriers fut tout de suite extraordinaire. « la salle pouvait bien contenir 1 000 à 1 200 personnes debout. A peine ouverte elle se remplit et depuis ne cessera de regorger d'auditeurs. Et quels auditeurs ! Sans doute fallait-il quelque courage pour affronter le tumulte des premières réunions, la chaleur et les odeurs de la salle. Nos réunions continuèrent sans interruption jusqu'au moment où éclata la formidable insurrection de juin. On ferma les ateliers nationaux du jour au lendemain, 40 000 hommes valides et sans ressources furent jetés sur le pavé de Paris. La troupe fit feu. Comme une traînée de poudre, le cri se répandit dans les faubourgs « on égorge nos frères » ; le quartier Mouffetard, ignorance, misère et vices réunis se leva comme un seul homme. Pendant trois mortelles journées, au bruit du canon et de la fusillade, des flots de sang coulèrent. Quand tout fut fini, je me mis en quête de mon pauvre troupeau. Au bout de quelques semaines j'en avais ramassé les débris et les vides étaient comblés par de nouveaux venus dans les réunions du Vieux Chêne. « Nous parlions de choses sérieuses, on s'occupait de l'Evangile. Un grand nombre préférait les soirées du Vieux-Chêne aux soirées du cabaret ou de la barrière ». Lettre amicale aux habitants du Faubourg St Marceau, décembre 1849.
Puis Léon Pilatte évoque le choléra de 1849 sur le quartier Mouffetard, la fosse commune, les enfants orphelins recueillis par les familles misérables des survivants.
La salle du Vieux Chêne étant devenue trop petite, Léon Pilatte transporta son œuvre au 36 de la rue de l'Arbalète dans l'ancienne chapelle d'un couvent. Léon Pilatte fut plusieurs fois condamnés pour ses activités et la rue de l'Arbalète fut fermée en mai 1850 par le préfet de police Pietri. Léon Pilatte prêchait le christianisme comme seule solution de la question sociale.
Au cours du Second Empire, la paroisse de Plaisance se développa et se dédoubla par une annexe rue de la Glacière qui servit d'école et de lieu de culte.
En 1847, Meyer, pasteur luthérien, fonde l'œuvre Evangélique du Quartier St Marcel. A cette époque il n'y a presque plus de protestants dans le quartier. « Ces protestants, dit-il, étaient de pauvres balayeurs, toutes les misères humaines s'y trouvaient réunies , les ¾ de ce triste peuple ne savait ni lire, ni écrire, la vie animale était la seule qu'il connut ». Il loua au départ une chambre rue Cuvier pour y installer son école pour y accueillir « des enfants de balayeurs protestants, des enfants de chiffonniers catholiques de nom, mais pour la plupart sans aucune attache à l'Eglise. » Sa chambre étant devenue trop petite il loue un local au-dessus d'une vacherie au 41 de la rue Rollin.
Après une campagne de dons en 1853 Louis Meyer décida d'acheter un immeuble au 19 rue Tournefort pour le prix de 1 million de francs, mais comme il n'y avait pas d'accès sur la Mouffetard et comme c'était la grande artère de ce quartier populaire, l'œuvre acheta la maison du 44 de la rue Mouffetard, derrière celle qu'il venait d'acheter rue Tournefort (25 000 francs). Une vaste école s'installa alors, qui pouvait accueillir 500 enfants (dont beaucoup d'enfants allemands, qui recevaient un enseignement spécifique dans leur langue.)
« Ah! ce fut un beau jour que celui de l'introduction des écoles dans ces locaux neufs. Quelle différence avec les pauvres classes délabrées que l'on quittait. Quand on pense aux habitations de la plupart des familles de ces enfants, on se sent heureux de les placer dans une atmosphère meilleure ».
C'est en 1862 que le pasteur Appia inaugura par une suite de méditation sur l'épître aux Romains le culte officiel du dimanche matin, et constitua ainsi en église paroissiale la chapelle Saint-Marcel.
La guerre de 1870 a du être fatale pour l'œuvre, elle a continué son travail encore quelques années, puis l'Eglise luthérienne a déménagé rue Pierre Nicole où elle se trouve encore.
1870 est la date où Benjamin Couve, pasteur à Plaisance puis à Pentemont, à l'image de Léon Pilatte, s'installe d'abord dans une salle d'école située rue Saint-Jacques pour des réunions d'évangélisation ; il déménage dans une boutique, rue Monge, puis dans la salle Monge. Cet œuvre comprend un culte tous les dimanches, une réunion d'évangélisation, un patronage le jeudi, une école du dimanche, un catéchisme, des répétitions de chant une union chrétienne de jeunes filles, une union de jeunes gens, des réunions de mères de famille, une bibliothèque, diverses institutions sociales pour « assurer à la jeune ouvrière le mobilier ou le trousseau… Voilà ce que l'on fait dans cette salle obscure, possédant deux petites annexes. On étouffe dans ce fond de cour » dira le texte d'appel de fond pour la construction de la Maison Fraternelle.
Pendant ce temps la paroisse de Plaisance continue à se développer et le 31 juillet 1883, le CP de Plaisance obtient un pasteur supplémentaire en la personne du pasteur Frantz Jacot ; ce pasteur sera particulièrement chargé de la desserte de la section de la Glacière. Il s'étonnera dans une séance du CP que les cultes de la Glacière soient très peu suivis alors que selon lui on compte 2 000 protestants dans le XIIIème arrondissement. En 1884 l'école de la Glacière ferme du fait à la fois du départ des enseignants et de la fin du bail. Le CP décide donc de chercher un autre lieu. En 1885 il loue un local au 35 rue Lebrun, il sera appelé « Oratoire des Gobelins », le CP décide de ne plus faire d'école. Le pasteur Jacot fait remarquer que le local est peu adapté car trop sombre. L'inauguration de ce local a lieu le dimanche 19 avril 1885 ; à l'extérieur est noté « Consistoire de l'Eglise réformée de Paris, oratoire des Gobelins » et à l'intérieur « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé ». Le nombre de personnes au culte augmente ainsi que les collectes « le zèle des habitants de ce quartier se manifeste à tel point qu'on a manqué de place au jour de la fête de Pentecôte » dit le pasteur Jacot.
Le 6 décembre 1896, le pasteur Jacot annonce au CP de Plaisance qu'il vient d'acheter un terrain boulevard Arago pour y faire construire un temple. L'architecte en sera Augustin Rey et il espère pouvoir inaugurer le temple à Pâques 1898.
Ce temple s'appela Port-Royal, par référence au passé janséniste du quartier, « ces catholiques, les plus austères et les plus pieux de leur temps, furent persécutés comme nos pères. On vit des femmes, des religieuses comme Jacqueline Pascal, refuser de se plier, alors que de grands personnages se soumettaient ». « Si les évêques ont des courages de femmes, les femmes auront des courages d'évêques » disaient-elle. Et son frère, l'illustre Blaise Pascal, sur son lit de maladie, a écrit, non loin d'ici, rue Rollin, son livre sublime des Pensées ».
Le pasteur Frantz Jacot eut pour suffragant vers la fin de son ministère son fils, Samuel Jacot qui mourut prématurément ;la mort du fils hâta peut-être la fin du père, en 1903. Le 4 octobre 1903, le CP de Plaisance rend hommage au pasteur Jacot. C'est son gendre, le pasteur Louis Kreyts, qui lui succéde. Son ministère s'étendra de 1903 à 1939.
Déjà à l'époque il y avait des liens entre la future Maison Fraternelle et Port-Royal, puisque c'est le pasteur Benjamin Couve, à la tête de l'œuvre de la rue Monge, qui aida le pasteur Kreyts dans son début de ministère.
En février 1906 que la paroisse de Port-Royal devient paroisse autonome.
En 1910, le CP de Pentemont s'est rendu acquéreur d'un terrain de 950 m², assez vaste pour permettre à l'œuvre de la rue Monge tout son développement. Il est situé rue Tournefort, à proximité de la rue Mouffetard, non loin du Panthéon, dans une situation « qui permet d'atteindre la population ouvrière de ce quartier et de lui offrir un foyer chrétien. « Une œuvre évangélique sociale dans la rue Tournefort est digne d'intéresser tous les protestants. Jadis M. le pasteur Louis Meyer l'y avait entreprise avec l'appui de tout le protestantisme parisien. Si l'Eglise luthérienne de Saint-Marcel a quitté cet endroit pour se transporter près de l'Observatoire, nous estimons que tous les chrétiens doivent à leur maître de l'annoncer et de faire œuvre de relèvement dans un des quartier de Paris qui, pour être près du Centre, n'en n'est pas moins un des plus malheureux et où la misère est tout aussi morale que matérielle. »
C'est le pasteur Philippe de Félice qui sera le premier pasteur de la Maison Fraternelle. Philippe de Félice est mort en 1964, Albert Finet écrit sa nécrologie dans Réforme. « C'était un homme discret, qui ne faisait pas étalage de ses connaissances ». Professeur à l'Ecole des Hautes Etudes, à la faculté protestante de théologie, conservateur à la bibliothèque du Protestantisme français et secrétaire de la société de l'histoire du protestantisme. Mais, dit Albert Finet, dans le quartier Mouffetard, on se moquait éperdument des formes intérieures de la mystique et d dépassement de l'homme par lui-même. Mais « monsieur Félix » comme on l'appelait, était connu comme le loup blanc. En parlant de la Maison Fraternelle, Albert Finet dit : « c'était, c'est toujours une église, une paroisse où la parole de Dieu était annoncée chaque dimanche. C'était, comment dire, une maison, un foyer, une école, un asile, voire l'antre d'une bande, où de la prime jeunesse au déclin de l'âge, chacun trouvait son lot. Philippe de Félice, dans ce quartier attachant et mal famé, y créa de toutes pièces dispensaire, école du soir, garderie, la première troupe d'éclaireurs, des groupes de jeunes, des cercles d'adultes, un accueil pour les vieillards. Il réalisa au niveau d'un quartier, une expérience probante de christianisme social. Brice Deymié 18 juin 2006
La Maison Fraternelle aujourd'hui (présentation des lieux)
Sous Bonaparte la rive droite a deux temples : celui de Sainte-Marie et celui de la rue Saint-Thomas du Louvre, en échange duquel sera cédé en 1811 l'Oratoire du Louvre. On donne à la rive gauche le seul temple de Pentemont (ancienne abbaye de Pentemont) ; ce temple restera longtemps encore magasin de fourrages de la caserne voisine. Pentemont ne fut ouvert au culte qu'après 1840.
En octobre 1834 se fonde la pension Keller, rue de Chevreuse, et c'est vers la rue Madame que va se transporter peu à peu le centre protestant de la rive gauche.
Pourtant au XVIème siècle ce quartier fut le premier foyer de la Réforme. « Les progrès de la Réforme excitèrent bientôt une vive opposition de la part de ce corps (La Sorbonne) dont l'influence se fit facilement sentir sur la basse classe, alors comme toujours ignorante et tumultueuse. C'est cette alliance tacite mais naturelle, entre l'intelligence et la violence aveugle, que se servit l'esprit des ténèbres pour anéantir la lumière de l'Evangile. »
De nombreuses assemblées se tenaient ici dans le quartier Saint-Marcel. Le 4 septembre 1558, trois à quatre cents luthériens furent pris à partie à la sortie de leur culte qui avait lieu rue Saint-Jacques.
Un événement important s'est produit en 1563 : la destruction du temple des patriarches. Ce temple, certainement en bois, était situé sur la maison dite des patriarches qui avait été bâtie par Bernard Chanac, patriarche de Jérusalem.
Le 27 décembre, 2 000 protestants étaient réunis dans ce temple pour y entendre la prédication. Le curé de Saint-Médard, dont l'église était presque contiguë au temple, fit sonner à toute volée les cloches de son église pour empêcher la prédication. Le pasteur envoie alors deux diacres pour prier amicalement le curé de bien vouloir faire cesser cette sonnerie, mais les deux envoyés sont reçus à coup de pierres et l'un d'eux est tué. Les protestants avertis accourent à Saint-Médard où bientôt une lutte s'engage, mais la force armé intervient et les protestants ont gain de cause. Le soir après le culte, ceux-ci entrent triomphalement en ville ; mais cet imprudent étalage de leur succès excite la haine de leurs ennemis qui le lendemain se portent en foule vers leur temple et y mettent le feu. (lire la recension du même événement côté catholique).
Revenons maintenant au XIX° siècle
La population du quartier y est tout à fait misérable, composée de beaucoup d'immigrés venus de l'Allemagne et de la France de l'Est.
Première œuvre protestante dans le quartier celle de Léon Pilatte en 1848, né catholique dans le Loir et Cher, élève de l'école des Arts et Métiers d'Angers. A la nouvelle de la Révolution il accourt à Paris et loue la salle du Vieux Chêne au 69 de la rue Mouffetard. L'influence de Pilatte sur les ouvriers fut tout de suite extraordinaire. « la salle pouvait bien contenir 1 000 à 1 200 personnes debout. A peine ouverte elle se remplit et depuis ne cessera de regorger d'auditeurs. Et quels auditeurs ! Sans doute fallait-il quelque courage pour affronter le tumulte des premières réunions, la chaleur et les odeurs de la salle. Nos réunions continuèrent sans interruption jusqu'au moment où éclata la formidable insurrection de juin. On ferma les ateliers nationaux du jour au lendemain, 40 000 hommes valides et sans ressources furent jetés sur le pavé de Paris. La troupe fit feu. Comme une traînée de poudre, le cri se répandit dans les faubourgs « on égorge nos frères » ; le quartier Mouffetard, ignorance, misère et vices réunis se leva comme un seul homme. Pendant trois mortelles journées, au bruit du canon et de la fusillade, des flots de sang coulèrent. Quand tout fut fini, je me mis en quête de mon pauvre troupeau. Au bout de quelques semaines j'en avais ramassé les débris et les vides étaient comblés par de nouveaux venus dans les réunions du Vieux Chêne. « Nous parlions de choses sérieuses, on s'occupait de l'Evangile. Un grand nombre préférait les soirées du Vieux-Chêne aux soirées du cabaret ou de la barrière ». Lettre amicale aux habitants du Faubourg St Marceau, décembre 1849.
Puis Léon Pilatte évoque le choléra de 1849 sur le quartier Mouffetard, la fosse commune, les enfants orphelins recueillis par les familles misérables des survivants.
La salle du Vieux Chêne étant devenue trop petite, Léon Pilatte transporta son œuvre au 36 de la rue de l'Arbalète dans l'ancienne chapelle d'un couvent. Léon Pilatte fut plusieurs fois condamnés pour ses activités et la rue de l'Arbalète fut fermée en mai 1850 par le préfet de police Pietri. Léon Pilatte prêchait le christianisme comme seule solution de la question sociale.
Au cours du Second Empire, la paroisse de Plaisance se développa et se dédoubla par une annexe rue de la Glacière qui servit d'école et de lieu de culte.
En 1847, Meyer, pasteur luthérien, fonde l'œuvre Evangélique du Quartier St Marcel. A cette époque il n'y a presque plus de protestants dans le quartier. « Ces protestants, dit-il, étaient de pauvres balayeurs, toutes les misères humaines s'y trouvaient réunies , les ¾ de ce triste peuple ne savait ni lire, ni écrire, la vie animale était la seule qu'il connut ». Il loua au départ une chambre rue Cuvier pour y installer son école pour y accueillir « des enfants de balayeurs protestants, des enfants de chiffonniers catholiques de nom, mais pour la plupart sans aucune attache à l'Eglise. » Sa chambre étant devenue trop petite il loue un local au-dessus d'une vacherie au 41 de la rue Rollin.
Après une campagne de dons en 1853 Louis Meyer décida d'acheter un immeuble au 19 rue Tournefort pour le prix de 1 million de francs, mais comme il n'y avait pas d'accès sur la Mouffetard et comme c'était la grande artère de ce quartier populaire, l'œuvre acheta la maison du 44 de la rue Mouffetard, derrière celle qu'il venait d'acheter rue Tournefort (25 000 francs). Une vaste école s'installa alors, qui pouvait accueillir 500 enfants (dont beaucoup d'enfants allemands, qui recevaient un enseignement spécifique dans leur langue.)
« Ah! ce fut un beau jour que celui de l'introduction des écoles dans ces locaux neufs. Quelle différence avec les pauvres classes délabrées que l'on quittait. Quand on pense aux habitations de la plupart des familles de ces enfants, on se sent heureux de les placer dans une atmosphère meilleure ».
C'est en 1862 que le pasteur Appia inaugura par une suite de méditation sur l'épître aux Romains le culte officiel du dimanche matin, et constitua ainsi en église paroissiale la chapelle Saint-Marcel.
La guerre de 1870 a du être fatale pour l'œuvre, elle a continué son travail encore quelques années, puis l'Eglise luthérienne a déménagé rue Pierre Nicole où elle se trouve encore.
1870 est la date où Benjamin Couve, pasteur à Plaisance puis à Pentemont, à l'image de Léon Pilatte, s'installe d'abord dans une salle d'école située rue Saint-Jacques pour des réunions d'évangélisation ; il déménage dans une boutique, rue Monge, puis dans la salle Monge. Cet œuvre comprend un culte tous les dimanches, une réunion d'évangélisation, un patronage le jeudi, une école du dimanche, un catéchisme, des répétitions de chant une union chrétienne de jeunes filles, une union de jeunes gens, des réunions de mères de famille, une bibliothèque, diverses institutions sociales pour « assurer à la jeune ouvrière le mobilier ou le trousseau… Voilà ce que l'on fait dans cette salle obscure, possédant deux petites annexes. On étouffe dans ce fond de cour » dira le texte d'appel de fond pour la construction de la Maison Fraternelle.
Pendant ce temps la paroisse de Plaisance continue à se développer et le 31 juillet 1883, le CP de Plaisance obtient un pasteur supplémentaire en la personne du pasteur Frantz Jacot ; ce pasteur sera particulièrement chargé de la desserte de la section de la Glacière. Il s'étonnera dans une séance du CP que les cultes de la Glacière soient très peu suivis alors que selon lui on compte 2 000 protestants dans le XIIIème arrondissement. En 1884 l'école de la Glacière ferme du fait à la fois du départ des enseignants et de la fin du bail. Le CP décide donc de chercher un autre lieu. En 1885 il loue un local au 35 rue Lebrun, il sera appelé « Oratoire des Gobelins », le CP décide de ne plus faire d'école. Le pasteur Jacot fait remarquer que le local est peu adapté car trop sombre. L'inauguration de ce local a lieu le dimanche 19 avril 1885 ; à l'extérieur est noté « Consistoire de l'Eglise réformée de Paris, oratoire des Gobelins » et à l'intérieur « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé ». Le nombre de personnes au culte augmente ainsi que les collectes « le zèle des habitants de ce quartier se manifeste à tel point qu'on a manqué de place au jour de la fête de Pentecôte » dit le pasteur Jacot.
Le 6 décembre 1896, le pasteur Jacot annonce au CP de Plaisance qu'il vient d'acheter un terrain boulevard Arago pour y faire construire un temple. L'architecte en sera Augustin Rey et il espère pouvoir inaugurer le temple à Pâques 1898.
Ce temple s'appela Port-Royal, par référence au passé janséniste du quartier, « ces catholiques, les plus austères et les plus pieux de leur temps, furent persécutés comme nos pères. On vit des femmes, des religieuses comme Jacqueline Pascal, refuser de se plier, alors que de grands personnages se soumettaient ». « Si les évêques ont des courages de femmes, les femmes auront des courages d'évêques » disaient-elle. Et son frère, l'illustre Blaise Pascal, sur son lit de maladie, a écrit, non loin d'ici, rue Rollin, son livre sublime des Pensées ».
Le pasteur Frantz Jacot eut pour suffragant vers la fin de son ministère son fils, Samuel Jacot qui mourut prématurément ;la mort du fils hâta peut-être la fin du père, en 1903. Le 4 octobre 1903, le CP de Plaisance rend hommage au pasteur Jacot. C'est son gendre, le pasteur Louis Kreyts, qui lui succéde. Son ministère s'étendra de 1903 à 1939.
Déjà à l'époque il y avait des liens entre la future Maison Fraternelle et Port-Royal, puisque c'est le pasteur Benjamin Couve, à la tête de l'œuvre de la rue Monge, qui aida le pasteur Kreyts dans son début de ministère.
En février 1906 que la paroisse de Port-Royal devient paroisse autonome.
En 1910, le CP de Pentemont s'est rendu acquéreur d'un terrain de 950 m², assez vaste pour permettre à l'œuvre de la rue Monge tout son développement. Il est situé rue Tournefort, à proximité de la rue Mouffetard, non loin du Panthéon, dans une situation « qui permet d'atteindre la population ouvrière de ce quartier et de lui offrir un foyer chrétien. « Une œuvre évangélique sociale dans la rue Tournefort est digne d'intéresser tous les protestants. Jadis M. le pasteur Louis Meyer l'y avait entreprise avec l'appui de tout le protestantisme parisien. Si l'Eglise luthérienne de Saint-Marcel a quitté cet endroit pour se transporter près de l'Observatoire, nous estimons que tous les chrétiens doivent à leur maître de l'annoncer et de faire œuvre de relèvement dans un des quartier de Paris qui, pour être près du Centre, n'en n'est pas moins un des plus malheureux et où la misère est tout aussi morale que matérielle. »
C'est le pasteur Philippe de Félice qui sera le premier pasteur de la Maison Fraternelle. Philippe de Félice est mort en 1964, Albert Finet écrit sa nécrologie dans Réforme. « C'était un homme discret, qui ne faisait pas étalage de ses connaissances ». Professeur à l'Ecole des Hautes Etudes, à la faculté protestante de théologie, conservateur à la bibliothèque du Protestantisme français et secrétaire de la société de l'histoire du protestantisme. Mais, dit Albert Finet, dans le quartier Mouffetard, on se moquait éperdument des formes intérieures de la mystique et d dépassement de l'homme par lui-même. Mais « monsieur Félix » comme on l'appelait, était connu comme le loup blanc. En parlant de la Maison Fraternelle, Albert Finet dit : « c'était, c'est toujours une église, une paroisse où la parole de Dieu était annoncée chaque dimanche. C'était, comment dire, une maison, un foyer, une école, un asile, voire l'antre d'une bande, où de la prime jeunesse au déclin de l'âge, chacun trouvait son lot. Philippe de Félice, dans ce quartier attachant et mal famé, y créa de toutes pièces dispensaire, école du soir, garderie, la première troupe d'éclaireurs, des groupes de jeunes, des cercles d'adultes, un accueil pour les vieillards. Il réalisa au niveau d'un quartier, une expérience probante de christianisme social. Brice Deymié 18 juin 2006
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