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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

PREMIERE PARTIE DU RAPPORT MORAL ASSEMBLEE GENERALE 2015

Merci aux 74 participants de cette AG !



RAPPORT MORAL EDITION 2015-  par R.Philipoussi

 

Les événements de ce début d'année à Paris, et les autres actes similaires qui se sont déroulés depuis à Copenhague, à Tunis, mais aussi tous les autres massacres qui ont lieu plus loin de notre sphère médiatique émotionnelle, viennent brutalement nous interroger au coeur de notre être d'Eglise et sur plusieurs angles et nous allons devoir faire face à "ça" en tant qu'Eglise. Cette année, l'actualité est tellement saisissante que même un rapport moral ne peut éviter d'en tenir compte.

 

Je vais dans ce rapport moral, évoquer en quoi l'être même de l'Eglise pourrait être entamé voire corrompu par ce qui se passe, si d'une part nous ne prêtons pas une vraie attention à ce que nous faisons et pourquoi et comment nous le faisons et si d'autre part nous ne relevons pas le niveau de priorité de certaines actions.

Une Eglise, du grec ekklesia, assemblée, terme venu de l'ekklesia grecque qui désignait l'assemblée du peuple citoyen dans de nombreuses cités grecques.

L'ekklesia chrétienne, c''est l'assemblée des citoyens de la cité de Dieu, qui exprime sa voix pour designer aussi son gouvernement,- comme nous venons de le faire - et qui donne de la voix aussi pour annoncer le message de celui qu'elle a reçu comme sauveur et libérateur , Jésus de Nazareth, le Christ, son message c'est l'évangile qui parcourt le peuple de Dieu depuis l'origine, et qui est destiné au monde entier, et plus précisément pour une ekklesia locale comme la nôtre, nos arrondissements. Tout ça pour dire qu'une ekklesia, ce n'est pas simplement une communauté qui vit ensemble comme dans une forme de réclusion. C'est un mouvement d'assemblée qui vit avec le monde et qui lui parle et qui interagit avec lui.

 

 

Les intellectuels nihilistes et sophistiqués qui guident tous ces attentats ont un but : détruire tant qu'ils le peuvent toutes les expressions de la confiance, les assécher, les polluer. Afin que quand la confiance sera extrêmement abimée, la dépression sera telle qu'il n'y aura plus aucun problème pour que la terreur devienne institutionnelle, qu'elle soit islamique ou non. Et ce partout où les digues des assemblées , des ekklesia, démocratiques se seront repliées ou asséchées.

Comme vous le savez, la foi en Dieu que nous avons, ou sur laquelle parfois nous nous interrogeons, n'est qu'une spécification d'une matière beaucoup plus universelle et indispensable qui s'appelle la confiance, celle qui permet de s'endormir, celle qui permet de traverser la rue, celle qui permet de s'abandonner à l'écoute d'un ami, celle aussi primale, qui permet à un enfant de saisir sans peur la main qui le guide.

La particularité qui consiste à désigner Dieu comme la source de notre confiance - " avoir foi en Dieu" - permet à la fois de ne pas la perdre puisque celui qui est la source est éternel et simultanément pour avoir le discernement pour la placer à bon escient dans un homme, une femme, une institution, une parole, un livre, une confession de foi une loi...

Or, aujourd'hui, tous les rivières qui viennent de la source de cette confiance sont en voie d'être polluées

 

- confiance en l'humain. D'une part parce que des humains sont capable d'accomplir de telles horreurs et d'autre part parce qu'en réfléchissant un peu, nous nous rendons compte que leur altérité n'est pas totale : ils utilisent des armes que nos société légales fabriquent, ils utilisent des réseaux sociaux qui sont aussi les nôtres, ils utilisent des modes de propagandes que nous avons inventés, parfois ils ont été scolarisés dans nos écoles, ils ont grandis dans nos villes, et ils participent de cette philosophie cynique qui déjà a bien corrompu notre société. Cette perte de confiance en l'humain commence à éroder la confiance en nous-mêmes, en nos valeurs, nos institutions, notre mode de vie.

 

Nos réponses et priorités : certes locales, certes infinitésimales face au problème mondial, mais c'est le propre d'une ekklesia, à la fois faire des choses, et en même temps que ces choses là soient symboliques et anticipations du royaume de Dieu

 

Nous avons créé ce que nous appelons les DIMANCHE ENSEMBLE, pas simplement pour faire joli, mais pour permettre que de nouveaux liens se tissent et que d'autres se resserrent entre les membres éparpillés de notre communauté. Ainsi dans une seule journée, les écoliers bibliques et leurs parents, les catéchumènes et leurs parents, les personnes qui vont au culte, les invités à ces cultes toujours un peu spéciaux, les convives qui s'assemblent aux repas, vivent quelque chose de plus qu'un moment ensemble. Ils proclament tranquillement une forme de solidarité essentielle que les grecs appelaient la philia, c'est à dire l'amour consenti des uns pour les autres au travers de l'accueil au café jusqu'à la communion. C'était, mais c'est devenu désormais un moment essentiel de notre proclamation de l'évangile, et je ne compte plus les témoignages qui disent combien ils ont été touchés par l'accueil simple et chaleureux qu'ils reçoivent lors de ces moments.?

 

Le hic, c'est que tout le monde n'a pas encore compris combien il est important de manifester aujourd'hui cette solidarité là. N'ont pas compris combien "ensemble" et si différents est extrêmement important. C'est à chacun de nous, qui en saisissons le sens, de la faire comprendre aux autres.

Le hic c'est que nous devons encore nous améliorer pour l'accueil. Panneau d'affichage de Port Royal impossible à ouvrir, perturbations entre les deux lieux de cultes, aucun groupe motivé pour faire la garderie de tous petits quand c'est nécessaire, ce qui exclue la présence des parents de jeunes enfants, existence d'une plaquette qui raconte comme notre Eglise fonctionne, chauffage de la grande salle qui dysfonctionne constamment

Et pourquoi tout cela n'est pas encore réglé ? Parce que nous sommes trop peu nombreux en tant que personnes actives pour ces actions là. Beaucoup trop de choses reposent sur trop peu de personnes. L'année 2015 est pour moi l'année où nous règlerons tous ces petits problèmes et si ce n'est pas possible, nous ferons des choix.

 

Ainsi à chaque fois que nous faisons ce geste d'assemblée, dans toutes les occasions que l'Eglise propose, nous proclamons que nous avons confiance en l'humain, et nous résistons à la programmation de la méfiance. Pour tous ceux qui ont une sympathie de l'évangile, cela devrait être une priorité.

Outre les dimanche ensemble, nous avons mis en place cette année ces rencontres mensuelles qui s'intitulent SUR LA TERRE COMME AU CIEL et qui mettent la bible en corrélation avec les problèmes sociétaux. Un lieu de réflexion et de débat, fort utile pour tous ceux qui s’aperçoivent en fait que leur catéchisme ne suffit pas pour appréhender le monde dans lequel ils vivent. Il leur est donc proposé d'aller plus loin. Ces événements mensuels en fin d'après midi de samedi, sont aussi des moments d'assemblée, qui nous permettent de vivre et de comprendre le monde dans lequel nous sommes en tant que chrétiens.

 

Les intellectuels nihilistes qui fomentent actuellement un chaos mondial cherchent à éroder la

- Confiance dans la valeur de la vie elle-même. Quand tant de massacres viennent nous toucher de près, et avec une telle fréquence, allons nous longtemps croire que la vie a de la valeur ? N'allons nous pas changer de mentalité, pour simplement supporter tout cela ? Allons nous rapidement devenir indifférent ? Pour nos protéger ?

 

Ici, notre réponse est déjà l'attention particulière et que nous devons décupler que nous portons à l'ENSEIGNEMENT RELIGIEUX: ÉCOLE BIBLIQUE, CATÉCHISME. S'ils sont bien surs des moments où doivent se faire une culture biblique, ce sont aussi des moments où l'éthique est pratiquée et enseignée. Cette année, le thème est "COMMENT DEVIENT ON PROPHÈTE ?" , comment donc avoir une parole de vie au milieu du monde en mouvement ? C'est un enjeu fondamental. C'est pourquoi il est important que nos catéchètes continuent de se former. L'année dernière le spectacle de Noel sur JONAS de l'école biblique n'a jamais réuni autant de monde , vous avez entendu dimanche il y a 15 jours les enfants lire des paroles prophétiques de Jérémie et Ézéchiel au dernier dimanche ensemble. La Bible n'est pas simplement un objet culturel, elle est aussi un moyen de découvrir l'attitude bonne dans un monde complexe.

 

Notre réponse pour la vie contre la mort ici se trouve aussi dans la particularité de notre Eglise, avec sa Maison Fraternelle qui est emplie d'entreprises créatives de tous ordres. En collaborant avec ces initiatives, en faisant par exemple intervenir des choeurs et des musiciens de grande qualité dans nos cultes ou dans d'autres événements, en soutenant l'association Scribe, en ayant une double programmation mensuelle de concerts pour le temple, ou en alternance théâtre et musique pour la Maison Frat, nous matérialisons l'espérance en la vie elle-même . Même si les paroissiens ne s’intéressent pas en masse à ce qui est proposé, quand le temple, ou la maison frat, vibrent de vie, de l'espérance concrète que mon Eglise offre, à ceux qui en ont eu besoin parce qu'ils se sont déplacés. Nos locaux, Le diafrat à la Maison Fraternelle, et la Cimade au Temple, sont disponibles pour le service évoqué tout à l'heure contribuent à ce que des laissés pour compte, des balayés par les vagues d'exil, ne perdent pas cette confiance en la vie.

C'est pourquoi,- ANECDOTE - quand la Région très récemment nous a proposé de louer le sous sol de la Maison frat (cuisine et deux salles) pour en faire des bureaux régionaux , nous avons promptement réagi, et ils ont enfin compris que nous tenions aux locaux dont nous sommes les responsables et les gérants. Mais jusqu'à quand vont ils le comprendre, tant que dans notre projet de vie ne sera pas explicitement inclu notre projet de paroisse à vocation artistique ? La diversité des initiatives dans cette maison est trop importante, même si elle nous situe comme une Eglise qui n'entre pas dans les cadres classiques, pour la transformer en bureaux. Mais jusqu'à quand ? C'est désormais à chacun de nous de comprendre que cette particularité dessine notre âme particulière.

Donc la dimension artistique de notre Eglise, auparavant animée par l'association ACT et désormais voulue et intégrée dans notre identité et la dimension du service, est un témoignage dont il s'agit que chacun prenne conscience de sa valeur et y participe. Il se trouve que dans notre Eglise, LA DIMENSION ARTISTIQUE EST UNE RÉPONSE DE VIE, de créativité face aux nihilistes destructeurs.

Mais toutes les actions y compris les plus classiques, comme la communion, les baptêmes, les services d'obsèques et les bénédictions de mariage, les visites, l'entraide, toutes, proclament la vie éternelle de Dieu qui remplit nos existences de chair et de sang. C'est notre réponse. Ce n'est pas que du rite. C'est une parole, une réplique, un engagement, un défi permanent.

 

- confiance en la valeur de la religion.

Ces exactions au nom de Dieu, même si nous décrétons que ce n'est pas notre Dieu, nous renvoient au caractère éminemment dangereux de la religion et viennent nous interroger sur la nôtre. Certains se demandent si le début de la fin des religions n'est pas vraiment entamé, puisqu'il semble que nous touchons au paroxysme. Si oui, quel deviendrait donc notre sens même d'être en Eglise ?

La religion selon sa double étymologie, c'est relier, mais c'est aussi relire. Relier, c'est déjà affirmer l'existence du lien et ce lien c'est Dieu. Il faut arrêter d'enfermer Dieu dans notre subjectivité, dans nos doutes ou notre exaltation. Dieu n'est pas dans notre choix qu'il soit ou non. Si nous parlons de lien, c'est qu'il est entre nous. Si nous ne croyons pas à cela, et si nous ne vivons pas cela en Eglise, c'est que nous avons perdu le sens même de notre sens de membre d'une Eglise. VENEZ VIVRE L’EXPÉRIENCE D'UN LIEN QUI N'EST PAS UNE CHAINE MAIS DE LIEN QUI NOUS UNIT TOUS. Faire l'Eglise c'est ça. ETRE RELIGIEUX C'EST ÇA. C'EST AFFIRMER QU'UN LIEN NOUS DÉPASSE ET NOUS UNIT À LA FOIS.

Les veilleurs à ce lien, pragmatiquement c'est le conseil presbytéral dont vous venez d'élire trois membres qui compensent deux départs et une place vacante, conseil dont le mandat se termine en mars de l'année prochaine, comme tous les conseils de notre Eglise. Ce conseil est confronté à de nombreux problèmes administratifs dont David va vous parler, mais il doit être soutenu par chacun de vous. Ceux qui veillent sur ce lien, c'est vous, c'est vous, ekkesia, les proclamateurs de cet évangile là. Inclusif, intéressant, ouvert, et fondé intellectuellement.

Et la religion c'est aussi relire . Dans le même esprit que la Réforme qui a relu la Bible et en a fait surgir un message de grâce au lieu d'un message de jugement effrayant. Le peuple de Dieu a ses écritures et doit les relire. La seule étude biblique qui reste dans notre paroisse est la formation des monitrices de l'école biblique du secteur que j'anime. L'étude biblique interne n'a pas réuni assez de monde. Nous allons mettre en place, si l'engouement revient, non pas une étude biblique purement culturelle, mais une formation à l'interprétation au témoignage et à la prédication. Parce qu'il est impossible de renoncer à articuler une parole dans le monde que nous vivons.

- Confiance dans l'universalité de notre message : quel sens prend désormais le message évangélique : va t il de resserrer jusqu'à ne plus être qu'un rempart identitaire? Ce qu'il semble devenir en masse, comme le démontre sans cesse les nouvelles résurgences traditionalistes ou fondamentalistes chrétiennes.

Il faudrait être sourd et aveugle pour ne saisir que le message de Jésus va bien au delà des clivages identitaires, c'est quand même bien lui qui aime le centurion, le samaritain, la samaritaine, et bien d'autres tous différents qu'il croise sur son chemin : ses paraboles, bombes poétiques désarmantes, son résumé de la loi : aime ton Dieu et ton prochain comme toi même sont des propositions de désarmement généralisé. Il l'a payé cher. Des ekkesia après lui ont fait résonner son utopie. Alors , encore une fois, il semble que le dialogue intereriligieux soit devenu aujourd'hui une priorité, c'est pourquoi consciemment j'ai orienté mon engagement oecuménique sur cette voie là. Mais pourquoi suis je le seul protestant dans la préparation de ces rencontres qui accueillent 3 fois par an plein de monde à la maison fraternelle ? Aimer son prochain comme soi même c'est ça, c'est apprendre à connaitre un Islam libéral, un judaïsme qui a bien des choses à nous apprendre en termes de relecture et de ferveur des rites et des fêtes. Et c'est un combat, certes local, mais un combat pour la paix. La prochaine rencontre publique aura lieu le 31 mai à la Maison Frat, et intitulera "OBÉIR, DÉSOBÉIR, DISCERNER", et elle accueillera un juif, un musulman, un chrétien et aussi un philosophe athée.

 

En conclusion :

Pour saisir tous ces enjeux, c'est évident, il faut faire mieux "assemblée" ekklesia.

Nous sommes de mieux en mieux organisés/ Le conseil résout un à un tous les problèmes administratifs. Et c'est pas fini ! Nous avons réussi à faire un secrétariat permanent tous les après midi, nous avons quelqu'un qui assure la fermeture des portes 3 fois par semaine, et cela va l'année prochaine être quelqu'un qui va assurer davantage. Ce qui commence à libérer votre pasteur de la tache de conciergerie et de prestataires de salles et facilite le choix des intervenants dans la maison : critère : il faut qu'il y ait une interaction, même minime.

Il faut se convertir au culte - expression ultime de l'ekklesia - comme un rendez vous important, et pas simplement optionnel, mais pour que cette possibilité se transforme en envie réelle, il va falloir améliorer le son la lumière et l'insonorisation de ce temple, il va falloir résoudre les problèmes permanents de chauffage à la maison frat,il va falloir enfin s'occuper du panneau de Port Royal, qs'occuper de la communication externe hors site, établir une la garderie et bien d'autres choses qui feront que notre Ekklesia ne sera pas simplement un refuge dans la tempête, mais une lumière dans la nuit pour tous les nomades que nous sommes depuis Caïn.

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