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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

L'atelier des prédicateurs



QUELQUES PRINCIPES D'EXÉGÈSE HOMILÉTIQUE Avant Propos

Modestement, ces quelques étapes. Le conseil est de les pratiquer en début de parcours, avant d'acquérir l'expérience qui permettra, non pas d'en sauter une ou deux, mais d'en franchir certaines simultanément.

D'abord, veuillez trouver ces trois étymologies qui font rêver:

Homélie

ὁμιλία, homilía (« réunion, assemblée ») dérivé de la racine *homou (« ensemble »). Celui ou celle qui "fait" l'homélie, "fait" l'assemblée. C'est la même dérive de sens que dans l'hébreu Qohéleth, qui est un nom féminin, désignant encore une fois celle (ou celui) qui crée l'assemblée par sa parole. N'oublions pas que celui ou celle ci est aussi aussi produit de l'assemblée. Cela illustre donc la nécessité quasiment naturelle pour son renouvellement de extériorisation d'un de ses membres par une assemblée l'ayant désigné pour être écouté.

Prédication

Là, cela vient du latin, et c'est exactement la même origine que "prédiction" ( prae-dicare : dire en avant, devant, mais aussi avant).Ne serait ce que pour rappeler que le prédicateur, avant d'être rationnel, convenu et répétiteur, est aussi issu de la lignée des pro-phètes (là aussi, cela veut dire "celui ou celle qui parle avant, devant, en avance").

Le même genre de poésie rappelle que parabole et parole ont exactement la même origine (du grec " jetée à côté / comparaison).

Pourquoi une exégèse homilétique ?

Elle est destinée à briser un vieux clivage. Celui de l'exégèse d'un côté et de la prédication de l'autre. Clivage qui a conduit à deux aberrations:

Celle de transformer des prédications en exposé historique et lexical, conclu par une vague injonction morale. Car non, la meilleure des exégèses ne fera jamais une prédication.

Celle de transformer des prédications en apologie pratique de l'anti intellectualisme, du refus de la logique et des contextes au profit de la parole assertive et génératrice d'émotion. Non, la prédication ne peut pas se passer d'une étude du texte et des contextes, du lexique, du repérage des enjeux théologiques.

N'oublions pas que la prédication est censée transmettre la/ une "bonne nouvelle" que le prédicateur incarne dans son acte de prêcher. Chacun est donc invité à se demander ce qui fait "bonne nouvelle" dans le texte dont il a voulu la responsabilité (capacité de répondre), et dans la prédication qu'il va donner. Comment cette "bonne nouvelle" prendra-t-elle forme dans la gangue textuelle et historique de la matière première avec laquelle il interagit.

0) Présenter le textes sous 3 formes:

Traduction NBS Traduction Bible de Jérusalem (ou T.O.B. ou autre sauf français courant*) et Traduction NBS sans majuscule ni ponctuation

Lire à haute voix, deux fois.

1) CONSIGNER VOS PREMIÈRES VRAIES RÉACTIONS, y compris vos "incompréhensions"

5 au maximum 2) LECTURE DU TEXTE. 2.1 Indications pour la lecture . noter ce que vous ne comprenez pas: un mot inconnu, une formule, une référence...

. voir ce que vous ne voyez pas : c'est à dire les endroits où votre cerveau a automatiquement compensé une lacune. Prendre des notes sur les points obscurs qui vous sont finalement apparus, généralement en nombre surprenant.

. examiner le lexique, re-traduire ce qui peut mériter de l'être (cf vos premières réactions) et résoudre quelques incompréhensions, faire quelques recherches.

. noter les redondances de lexique et de formes.

Prendre parallèlement des notes sur ce à quoi cela vous fait penser, et les mettre en réserve. Ne pas chercher à être exhaustif.

2.2 Le texte dans ses contextes . Passages précédents et suivants. Insertion dans un livre. . Votre contexte "pulsionnel" (ce que vous avez déjà envie de dire). . Le contexte présumé de l'assemblée à laquelle vous délivrerez votre prédication.

À ce moment-là, prendre conscience de - comment et où le texte vous a "touché" "parlé" , - quels personnage.s vous vous seriez spontanément identifiés voire - ce qui vous met en colère, ce que vous n'approuvez pas, ou trouvez ridicule. Etalez votre ressenti, sans tenir compte d'une logique ni d'un "respect" quelconque. Vous êtes seul, libre face au texte et vous avez le droit de ressentir ce que vous ressentez.

Si, et c'est probable, la narration présente un "changement" (d'un point de vue à un autre, d'un état d'un personnage à un autre, d'un forme de réalité à une autre): noter la façon dont s'effectue ce changement et mesurer la possibilité d'exporter cette structure de changement dans votre prédication elle-même**.

2.3 Structuration Abandonner provisoirement ce que vous pensez et prendre de la distance par la tentative d'élaborer un ou deux plans du texte avec l'invention d'une sous-titraille, en restant attentif aux connexions entre les parties que vous avez déterminées.

Vous n'êtes pas obligé de segmenter scolairement. Il est possible aussi de vous représenter un fil narratif. Dessiner alors une corde à noeuds .

3 ) DÉTERMINATION DES ENJEUX THÉOLOGIQUES Que dit le texte "sur Dieu", sur le Christ, sur le rapport humain/Dieu.

(au fil de votre progression, les enjeux vont être de plus en plus profonds)

4) VOS COMMENTAIRES Écrire le commentaire de votre texte en employant la méthode du pas à pas, c'est-à-dire verset par verset ou phrase par phrase ou par les unités de sens que vous auriez perçus. Cette méthode du pas à pas permet de sédimenter du sens dont on verra qu'il n'est pas rectiligne . Paraphrase encouragée. Ce que vous écrivez à ce moment là n'a pas vocation à devenir votre prédication, ni à être gravé dans le marbre ***. C'est le moment où vous préparez le moule de votre prédication.

5) ÉLABORATION DE 3 PISTES DE PRÉDICATION 5.1 ) Auto Justification de vos choix et de votre choix final

6) ÉCRITURES

6.1 Si tout le travail précédent a été fait, la première phase d'écriture doit être "libre" plaisante et continue 6.2 Ensuite, à partir de ce matériel, vous pouvez planifier votre prédication (partie 1, 2 etc si vous avancez avec un plan), élaguer, réduire.

6.3 ré écrire vers la version écrite définitive

7) ORALISATION et corrections finales d'adaptations

Parfois à ce stade, vous apercevrez des fautes logiques, ou découvrirez le caractère allusif de certains passages qui ne pourront pas être compris de tout le monde.

* le principe de la traduction en français courant est qu'elle transforme des termes en périphrase, ce qui rend la lecture plus facile. L’inconvénient majeur est que cette traduction " fond" le lexique et empêche de retrouver d'autres éventuelles "valeurs" d'un terme.

** metanoia, en grec, est traduit par "conversion ou repentance" en français, mais signifie littéralement " changement de mental". Cette structure en metanoia est très fréquente dans les évangiles et les textes dont la fonction était, non seulement de faire connaitre l'histoire évangélique, mais aussi de provoquer la conversion.

*** ce travail a l'objectif non seulement de vous éclairer sur ce que vous pensez, mais aussi de débarrasser d'avance votre future prédication de tout commentaire superflu.

 


Cette année, nous nous consacrons aux paraboles. Voici la présentation de la parabole du semeur sur notre chaine Youtube

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