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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

" les autres dieux... m'importent peu"

Prédication du 6 septembre, par Robert Philipoussi



Psaume 95
 Poussons des cris de joie pour le Seigneur !
Acclamons le Rocher de notre salut !
2 Allons au-devant de lui avec reconnaissance,
avec des psaumes acclamons-le.
3 Car le Seigneur (YHWH) est un grand Dieu,
c’est un grand roi au-dessus de tous les dieux.
 
 
Ez. 33 7 à 9
7 Toi, humain, je te nomme guetteur pour la maison d’Israël. Tu écouteras la parole de ma bouche et tu les avertiras de ma part. 8Quand je dirai au méchant : « Méchant, tu mourras ! », si tu ne parles pas pour avertir le méchant au sujet de sa voie, ce méchant mourra dans sa faute ; mais son sang, je te le réclamerai. 9Mais si, toi, tu avertis le méchant au sujet de sa voie, et qu’il ne revienne pas de sa voie, il mourra dans sa faute, et toi, tu sauveras ta vie.

Mat 18 15 -18
15 Si ton frère a péché contre toi, va et reprends-le seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. 16Mais, s’il ne t’écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute affaire se règle sur la parole de deux ou trois témoins. 17S’il refuse de les écouter, dis-le à l’Eglise ; et s’il refuse aussi d’écouter l’Eglise, qu’il soit pour toi comme un non-Juif et un collecteur des taxes. 18Amen, je vous le dis, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel.
Romains 13  8à 10 (LECTEUR)
8 Ne devez rien à personne, si ce n’est de vous aimer les uns les autres ; car celui qui aime l’autre a accompli la loi. 9En effet, les commandements : Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne commettras pas de meurtre, tu ne commettras pas de vol, tu ne désireras pas, et tout autre commandement se résument dans cette parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. 10L’amour ne fait pas de mal au prochain : l’amour est donc l’accomplissement de la loi.
 
PRÉDICATION
 
On peut passer à côté de cette phrase du psaume 95 "3 Car le Seigneur (YHWH) est un grand Dieu,c’est un grand roi au-dessus de tous les dieux ", mais on peut aussi s'y attarder et voir ce qu'elle génère, considérer ce qu'elle implique.
Oui, on peut passer à côté de cette phrase par exemple parce qu'on serait habitué à la mélodie biblique - voire qu'on en serait blasé. Comme d'une petite musique dite d'ascenseur qu'on finirait par ne plus entendre, parce qu'on aurait réussi à conditionner notre cerveau pour ne plus l'écouter.
On peut aussi sans passer à côté, la ranger d'emblée dans la catégorie de l'emphase, marque de ces innombrables flatteries de type courtisan qui parsèment la Bible mais plus généralement les liturgies dites de louange.
Mais aussi, il est possible de ne pas passer à côté et d'écouter ce que ça dit " Car le Seigneur (YHWH) est un grand Dieu,c’est un grand roi au-dessus de tous les dieux ". Et qu'est ce que ça dit, et bien c'est qu'il a d'autres dieux que YHWH mais que YHWH est le plus grand d'entre eux.
Cela n'a rien de choquant. Tous ceux et celles qui ont parcouru la Bible en dégageant un peu leurs oeillères se sont bien aperçu que le monothéisme, c'est à dire l'unicité de Dieu, ne s'est pas fait en un jour. Nous serions passés de l'exigence de ce qu'on appelle "la monolâtrie" à un monothéisme plus ou moins purifié, tel que celui qu'on retrouve dans le Coran.
On trouve une trace, un souvenir, de cette exigence de monolâtrie dans le début du décalogue, dans par exemple le chapitre 3 du livre de l'exode, au verset 2 je cite "Je suis l'Eternel, ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte, de la maison de servitude. Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face".
Aujourd'hui évidemment nous avons tendance à automatiquement retourner le sens en ceci qui dirait que " tu n'auras pas d'autre dieux parce qu'ils n'existent pas", ou puisqu'ils n'existent pas.
Mais l'exigence première dont cette phrase est un écho tardif est plutôt "méprise-les" pour qu'ils finissent par ne plus exister à tes yeux. Et nous avons un rappel encore plus premier degré dans le livre du prophète Michée au chapitre 4 verset 5 que je vous cite : 5 Tandis que tous les peuples marchent chacun au nom de son dieu,nous marchons, nous,au nom du Seigneur (YHWH), pour toujours, à jamais.
Je pense hélas (mais c'est une parenthèse) que l'auteur de cette phrase n'en n'a pas vu l'ironie puisque sa phrase se résume à dire : " les autres font cela, mais nous,bien au contraire, nous faisons la même chose". Mais bon, le coeur y est.
Il se trouve que le Dieu YHWH se caractérise entre autres par ce qui pour nous est un défaut envahissant à savoir la jalousie, comme le dit Exode 34:14, je cite :
Tu ne te prosterneras point devant un autre dieu; car l'Eternel porte le nom de jaloux, il est un Dieu jaloux.
Et on ne compte plus les injonctions impliquant la présence voire l'existence des autres dieux, toujours conspués, mais toujours là.
 
Jusqu'à ce que cette tendance en arrive à la production d'un texte qu'on pourrait qualifier de purifié, le célèbre "écoute Israël" que je cite dans le Deutéronome chapitre 6 : 4 Ecoute, Israël ! Le Seigneur, notre Dieu, le Seigneur est un. Cela dit, le problème n'est pas forcément complètement résolu car en hébreu subsiste la même ambiguïté qu'en français sur le fait d'être "un", cela veut dire à la fois "unique" mais aussi "unifié", comme on pourrait se lever un beau matin avec la belle sensation de n'être pas traversé de toutes nos contradiction habituelles, mais un, capable d'affronter l'adversité sans trop lui offrir de prises, mais sans croire non plus que nous serions unique, évidemment.
Si vous voulez plus de renseignement sur ce passage d'une forme de monolâtrie à cette affirmation du monothéisme, lisez Thomas Römer et un de ses best-seller intitulé "l'invention de Dieu", et/ ou lisez votre Bible sans trop de préjugés.
 
Pourquoi je vous raconte cela ? Et quel rapport avec les autres textes du jour ? C'est une question que normalement si vous êtes des auditeurs attentifs, vous seriez en droit de vous poser !
 
Et bien je vous raconte cela car je soutiens l'hypothèse que cette exigence de monolâtrie de la part d'un Dieu jaloux est une bonne introduction à pratiquer une morale liée à nous-même et qui ne serait pas susceptible de nous transformer en répétiteur servile de prescriptions, qui ne nous convaincraient pas nous mêmes ni les autres.
Ce Dieu jaloux, né finalement sur notre sol, et comme YHWH il a mis du temps à se constituer en tant que tel, puisque des recherches ont montré qu'il était d'abord un dieu de l'orage mais aussi un dieu des terres arides, pour finalement acquérir une personnalité relativement stable, ce Dieu-là revendique son existence, et sa supériorité devant l'assemblée des Dieux, et j'emploie cette expression à dessein car on la trouve dans le petit psaume, le 82- petit mais important- à côté duquel vous auriez pu passer et que je vous lis en intégralité :
1Psaume d'Asaph. Dieu se tient dans l'assemblée de Dieu; Il juge au milieu des dieux.
2Jusques à quand jugerez-vous avec iniquité, Et aurez-vous égard à la personne des méchants? Pause.3Rendez justice au faible et à l'orphelin, Faites droit au malheureux et au pauvre,
Sauvez le misérable et l'indigent, Délivrez-les de la main des méchants.
5Ils n'ont ni savoir ni intelligence, Ils marchent dans les ténèbres; Tous les fondements de la terre sont ébranlés. 6J'avais dit: Vous êtes des dieux, Vous êtes tous des fils du Très-Haut.
7Cependant vous mourrez comme des hommes, Vous tomberez comme un prince quelconque.
8Lève-toi, ô Dieu, juge la terre! Car toutes les nations t'appartiennent.
 
 
 
Ce Dieu non pas unique, mais d'abord unifié, on pourrait dire intègre que fait il, ils nous semonce de le choisir lui. Mais non seulement lui, mais aussi l'action qui va avec lui par exemple dans ce psaume: cesser d'avoir de l'égard à la personne des méchants, rendre justice à la veuve et l'orphelin, donnez des droits au malheureux et au pauvre etc.
C'est à dire que notre rapport à Dieu est d'abord constitué par un choix que nous faisons et non pas nous contenter simplement de l'accepter, non pas se retrouver simplement écrasé par l'évidence d'un Dieu unique dont l'immense solitude s'abattrait sur nous comme un soleil au moment d'un zénith trop violent. Et ce Dieu là nous le choisissons non pas par le fait qu'il est seul, ou sur le critère de sa beauté ou que sais je, mais en lien avec l'éthique que lui, seul, là en l'occurrence, veut.
Ici dans ce Psaume nous avons la restitution des droits, mais dans nos autres textes du jour, nous avons le ministère de l'avertissement face au "méchant", c'est à dire qu'on nous demande de l'ouvrir plutôt que de la fermer, c'est à dire que ce Dieu là nous demande- lui et pas les autres - de ne pas nous considérer comme faibles. Ce Dieu là, mais lui, pas les autres dieux - qui sont essentiellement des dieux libidineux et guerriers disons le - lui, jaloux certes, est le seul qui nous demande de pratiquer l'amitié entre nous. Oh pas l'amour, car "l'amour" tel que nous le concevons est une notion non biblique, non, plutôt l'amitié, l'amicalité sans concession, ce qui est à la fois beaucoup imaginable et aussi beaucoup plus difficile. Si la notion d'amour nous entraîne à la rêvasserie, l'amicalité ou l'amitié est quelque chose que nous connaissons vraiment et du coup, s'imaginer qu'on puisse la vivre par exemple entre frères réunis en son nom, là on en ressent l'exigence. Tandis que les aimer d'amour là par contre, ça ne mange pas de pain. Je peux aimer d'amour de loin. Je peux vivre dans cet idéal non biblique. Par contre l'amicalité, ce sont des actes.
 
Voilà donc ce que je voulais vous dire ce matin. Non pas faire un plaidoyer contre le monothéisme - vous pensez bien qu'à 59 ans je n'en suis plus à ce type de provocation- mais ce que je voulais c'est d'avoir essayé de vous faire percevoir que le Dieu Biblique est un choix , et que ce choix se retrouve dans l'exigence morale qui lui est consubstantielle. Et du coup, rien n'est une obligation, ni le choix de ce Dieu... Il y a bien d'autres dieux, même si nous n'y croyons pas, ils sont bien là, et beaucoup de gens leur rendent un culte, et s'y vautrent misérablement, mais les masses s'y vautrent t-elles par choix ? Délire consumériste, individualisme comme théorie finale de tout, ou même l'amour, ou le sport à outrance ou que sais je, n'importe quoi, la prolifération des dieux à honorer est pire que celle des punaises de lit dans les métropoles.
Rien n'est obligation. Ni le choix de ce Dieu - il est très facile de ne pas écouter ses exigences- la plupart des gens y réussissent très bien - ni le choix de la morale particulière qui lui est liée.
Ainsi, certes je crois mais je reste libre, et les autres Dieux m'importent peu, j'ai de la peine pour ceux et celles qui y succombent certes, mais d'abord je m'en moque. Je préfère mon Dieu à celui des autres. AMEN
.


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